La scène se passe sous d’autres cieux. Précisément en France. Où elle fait grand bruit. Une telle scène sous nos tropiques serait passée inaperçue. Sans bruit. Elle relèverait de l’épiphénomène. Ce qui n’est pas le cas chez eux. Les Blancs. Parlons de l’affaire Benalla. De cette affaire qui remue le Parlement français et agite les médias occidentaux.
Alexandre Benalla, membre de la sécurité du président français, Emmanuel Macron, a eu pour crime d’avoir frappé des individus dans la foule qui envahissait son mentor. Ce fait est devenu un problème d’Etat. Un sujet planétaire. Récupéré et amplifié par les médias. Toute la vie de Benalla a été passée au peigne fin. Son origine ! Ses compétences ! Son niveau d’étude ou social ! Sa psychologie !
Les débats n’en finissent point sur son acte. Les uns le condamnant, les autres essayant vaille que vaille de le défendre. Et pourtant, comme le clame le mis en cause, ce n’est qu’une histoire banale.
Oui, une histoire qui aurait paru banale sous nos cieux, mais qui agite le monde ailleurs. En effet, que d’exemple n’a –t-on pas de ces gardes du corps qui bousculent, agressent, frappent et humilient des individus chaque fois dans les entourages de nos chefs d’Etat, voire de nos leaders politiques sous nos tropiques. Même, un simple président de jeunesse de parti politique se fait parfois accompagner de gardes du corps civil, et même d’éléments des forces de défense et de sécurité à sa solde. L’on connait le zèle de ces hommes aux costumes noirs et lunettes fumées, ces armoires à glace et autres loubards toujours prêts à casser des mâchoires, ignorant à souhait que ceux qui suivent leurs maîtres sont ceux qui les font. Et leurs opposants sont ceux qui les aident à bâtir. C’est cela la démocratie ! Qui admet toutes les libertés ! Parfois même les libertinages.
N’est-ce pas qu’au nom de la démocratie, des déviants sont considérés comme des libres choix ? Et qu’il n’y a pas de sot et de saugrenus ? Et que la minorité est un droit ! Droit même pour celui qui jette de la poudre aux yeux de Nicolas Sarkozy ? Ou lance des œufs à un ministre au cœur de l’hémicycle ?
Qui oserait un tel crime en Afrique ? La prison serait un salut. Bien entendu s’il a la vie sauve pour y être conduit. Pour avoir fait son travail, combien de fois des journalistes n’ont subi le courroux de ces sbires ? Ces gros bras sans maitrise de leur triceps, qui respirent violence et agression autour de leurs maîtres ? Sont-ils au-dessus de la loi ces hommes et ses femmes recrutés parfois sur le tas et n’ayant véritablement aucune notion de la sécurité rapprochée.
Du zèle, ils en débordent toujours. Au mépris de ce que pourrait advenir le lendemain. On en a vu sous les différents hommes forts qui se sont succéder en Côte d’Ivoire. Depuis le coup d’Etat de 1999 sous feu le Gal Robert Guéi. Qui ne se souvient d’un certain Boka Yapi ? L’homme du fameux ‘’PC crise’’ décédé en exil au Benin après avoir imploré, larmoyant, les nouveaux dirigeants et les familles qu’il avait endeuillé pour regagner sa mère-patrie.
Quid de ces caïds sous le régime Gbagbo, qui rompaient avec l’air débonnaire de leur mentor pour se transformer en bourreaux du peuple. Il en existe encore, même sous la présidence actuelle.
Au-delà des dirigeants, ce sont des faits quasiment banaux qui se déroulent chaque jour dans le quotidien des Ivoiriens. Des maltraitances de garde du corps, même et surtout de leurs élus. Ces députés, maires et présidents de régions inaccessibles, qui se font entourer de sbires, après avoir quémandé les voix du peuple. Le même peuple qu’ils viendront à solliciter à nouveau au bout de leurs mandats.
Dans quelques semaines, les prochaines élections locales. L’heure du bilan a sonné. C’est l’occasion de savoir qui est qui, qui a fait quoi, qui mérite quoi ? Aux populations de prendre leurs responsabilités. De jauger de la loyauté de ceux qui les ont administrés. Et gérer les biens de leurs communes et régions. Chacun ira dans les urnes, non pas pour le beau costume où le long cortège de son élu. Mais, pour sa disponibilité, son accessibilité, ses actes et actions qui ont impacté son quotidien, son humilité, son charisme de rassembleur…. Bref, autant d’éléments pour jauger et faire son choix. Soit le renouvellement de la confiance pour ceux qui auront travaillé, mais surtout la sanction contre ces fainéants et arrogants prompts à tromper, à profiter et abuser de l’indulgence du peuple.
Autant, il n’y de leader sans peuple, il ne peut y avoir de leadership sans opposition. Sinon, le leader n’existe pas, et rien ne justifie son règne. Mais, ce règne prend plusieurs formes, selon ses rapports avec ses administrés. Soit, c’est l’anarchie, quand il y a une carence d’autorité. Ce que l’on voit dans bien de communes ivoiriennes, en particulier d’Abidjan où commerçants et transporteurs font la loi sous les yeux complices et complaisants des élus, voire des dirigeants tout court du pays. Soit c’est l’arrogance, manifeste par une gestion égocentrique, en rupture avec les administrés, ou la participation consistant à approcher, écouter, prendre en compte les aspirations de ceux qui placent leur confiance en vous, et travailler pour le bien-être de tous.
Si l’affaire Benalla a pris tant d’ampleur, c’est parce que les Français, estiment que leur président, Emmanuel Macron, celui en qui ils ont placé leur confiance, ne peut donner pouvoir, avec les moyens de l’Etat, relevant du contribuable, à un individu susceptible de leur servir du mépris. C’est cela la leçon. Laquelle doit être apprise par tous. Même sous nos cieux, et chacun à son humble niveau.
Félix D.BONY