Intelligence artificielle : Un spécialiste parle de son évolution

Publié le
intelligence-artificielle-un-specialiste-parle-de-son-evolution Intelligence artificielle (PhDr).
High tech

Faire le point sur le développement de l’Intelligence Artificielle. Jusqu’où pourront-elles aller ? Quelles sont leurs limites ? 20 Minutes a interrogé le chercheur Antoine Bordes.

A quelle vitesse a évolué la technologie ces dernières années ?

Il y a des domaines qui restent encore très compliqués pour les machines. Mais pour certains, considérés comme classiques, comme la reconnaissance d’objets, la traduction automatique, la reconnaissance de la parole, les avancées ont été vraiment très rapides. Bien plus rapides que ce que projetaient les experts.

Quelles sont les applications dans lesquelles l’IA intervient aujourd’hui ?

Partons plutôt de l’inverse, ça ira plus vite. Aujourd’hui, dans tout ce qui touche au numérique, quelles sont les applications qui ne font pas appel à l’IA ? Il y en a très très peu. Elle sert à créer de nouvelles expériences, de nouveaux divertissements en proposant de nouveaux outils aux créateurs et aux marques. Elle sert évidemment à organiser les plateformes comme les nôtres ; par exemple, à les protéger en détectant les contenus qui ne devraient pas s’y trouver. C’est tout l’écosystème qui est affecté par l’IA à divers degrés.

L’IA fait également avancer la science…

Elle aide effectivement énormément à la découverte scientifique. En biologie, en chimie. Pour la recherche médicale, aussi, où elle permet des avancées extrêmement rapides, que ce soit dans le traitement des données, dans la manière de générer des hypothèses.

Elle va être de plus en plus performante pour effectuer certaines catégories de tâches.

Je peux donner deux exemples. Dont un que nous avons développé et qui s’appelle Fast MRI, IRM rapide. C’est un algorithme qui permet de faire de la reconstruction d’images pour accélérer cette procédure d’imagerie médicale, qui est longue et qui peut être un peu traumatisante. D’habitude, c’est un examen qui dure 15 à 30 minutes. On arrive à diviser ce temps par quatre environ en prenant moins d’images et en demandant à l’IA de compléter la séquence. Ça a été testé cliniquement avec des médecins. C’est complètement open source comme toute la recherche que l’on fait et qui va pouvoir être utilisée par les fabricants.

Nos collègues de DeepMind [Google] ont aussi développé un logiciel qui permet de prédire la structure des protéines à partir de leur séquence en acides aminés. Ça va être une brique fondamentale pour la biologie demain.

Parlons de l’avenir justement. L’IA va continuer à s’enrichir au fil du temps mais son développement aura-t-il une limite ?

Le chercheur Yann LeCun, qui travaille avec nous, explique souvent que l’IA se rapproche plutôt d’une intelligence animale que d’une intelligence humaine. C’est-à-dire qu’elle pourra être bien plus avancée dans des segments précis, mais pas en général. Elle va être de plus en plus performante pour effectuer certaines catégories de tâches.

Par contre, voir une même IA faire aussi bien une recette de cuisine, analyser des protéines ou encore traduire toutes les langues, cela me semble plus compliqué. Avoir une intelligence qu’on pourrait appeler "générale", qui serait capable de tout faire, on en est quand même très loin. Donc, oui, dans ce sens-là, je pense qu’il y a une limite.