
Les États-Unis, pays leaders en intelligence artificielle (IA) plongent le monde entier dans l’inquiétude. Ce mercredi 02 octobre 2024, le juge dénommé John Mendez a bloqué l’une des lois sur l’intelligence artificielle en Californie, juste en moins de deux semaines après sa promulgation par le gouverneur Gavin Newsom.
Cette nouvelle loi sur les deepfakes de l’intelligence artificielle avait pour but ultime d’interdire la diffusion de deepfakes liés à des personnalités politiques, comme relatif au cas où Elon Musk a republié un deepfake de la vice-présidente Kamala Harris, provoquant une controverse. L'objectif de la loi était de contraindre les auteurs de ces contenus à les retirer sous peine de sanctions financières.
Le juge John Mendez a décidé de suspendre temporairement la loi, estimant que l'État ne pouvait pas encore imposer de telles restrictions sur les deepfakes électoraux sans examiner les enjeux de liberté d'expression.
En effet, un utilisateur de la plateforme X, Christopher Kohls, a rapidement déposé une plainte, affirmant que la vidéo de Kamala Harris était une satire protégée par le Premier Amendement. Le juge John Mendez a décidé de suspendre temporairement la loi, estimant que l'État ne pouvait pas encore imposer de telles restrictions sur les deepfakes électoraux sans examiner les enjeux de liberté d'expression.
La loi AB 2839 sous le feu des critiques
L'AB 2839 cible spécifiquement les créateurs et diffuseurs de deepfakes d'IA sur les réseaux sociaux, en particulier lorsqu'ils imitent des candidats politiques de manière à induire les électeurs en erreur. Contrairement à d'autres lois similaires, elle ne vise pas les plateformes hébergeant ces contenus, mais les individus qui les créent. Ce texte autorisait les juges à exiger la suppression des deepfakes en question sous peine de sanctions financières, offrant ainsi un nouveau cadre juridique pour contrer la désinformation en ligne.
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Toutefois, cette approche a été vivement contestée. Christopher Kohls a fait valoir que son deepfake de Kamala Harris constituait une forme de satire politique, un genre de discours largement protégé par le Premier Amendement aux États-Unis. Son recours a rapidement conduit à l'injonction temporaire de la loi.
Une bataille juridique en perspective
Le juge Mendez a ainsi ordonné une suspension temporaire de la loi, empêchant l'État de poursuivre Kohls ou tout autre auteur de deepfakes électoraux. Cependant, la décision laisse la porte ouverte à d'autres poursuites pour des contenus audio qui relèveraient de l'AB 2839. Ce jugement pourrait amorcer un long débat judiciaire sur l'équilibre entre la protection de la liberté d'expression et la lutte contre la désinformation politique.
Lisez par vous-même la décision du juge Mendez :
« Presque tout contenu modifié numériquement, lorsqu'il est laissé à la discrétion d'un individu arbitraire sur Internet, pourrait être considéré comme nuisible. Par exemple, les chiffres approximatifs générés par l'IA sur la participation électorale pourraient être considérés comme un faux contenu qui sape raisonnablement la confiance dans le résultat d'une élection en vertu de cette loi. D'un autre côté, de nombreuses représentations « nuisibles » lorsqu'elles sont montrées à une variété d'individus peuvent ne pas influencer les perspectives électorales ou saper la confiance dans une élection du tout. Comme le souligne de manière convaincante le plaignant, l'AB 2839 « s'appuie sur divers termes subjectifs et sur une intention délictueuse mal formulée », ce qui a pour effet d'impliquer de vastes quantités de discours politiques et protégés par la Constitution…
[M]ême si la crainte d’un paysage médiatique manipulé numériquement peut être justifiée, cette crainte ne donne pas aux législateurs une licence illimitée pour écraser la longue tradition de critique, de parodie et de satire protégée par le Premier Amendement. Les vidéos YouTube, les publications Facebook et les tweets X sont les publicités dans les journaux et les caricatures politiques d’aujourd’hui, et le Premier Amendement protège le droit d’un individu à s’exprimer quel que soit le nouveau média que ces critiques peuvent utiliser. D’autres causes d’action légales telles que les délits de confidentialité, la violation du droit d’auteur ou la diffamation offrent déjà un recours aux personnalités publiques ou aux particuliers dont la réputation peut être ternie par des représentations artificiellement modifiées colportées par des satiristes ou des opportunistes sur Internet…
Le dossier démontre que l'État de Californie a un intérêt majeur à préserver l'intégrité des élections et à lutter contre les contenus manipulés artificiellement. Cependant, l'intérêt de la Californie et les difficultés auxquelles l'État est confronté sont minimes lorsqu'ils sont mesurés par rapport à la gravité des valeurs du Premier Amendement en jeu et aux violations constitutionnelles continues que subissent le plaignant et d'autres créateurs de contenu dans une situation similaire lorsqu'ils voient leur discours réprimé.
Cette affaire met en lumière les difficultés rencontrées par les gouvernements pour réguler les technologies émergentes comme l'IA, tout en respectant les droits constitutionnels. Alors que la numérisation accélère la diffusion de contenus trompeurs, les législateurs doivent trouver des solutions adaptées aux enjeux technologiques sans restreindre les libertés fondamentales.